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Olivier Derroisne, inspecteur contrôleur de systèmes spatiaux/ orbitaux chez Thales Alenia Space : “Je suis de la génération Goldorak. Depuis tout petit, je rêve d’aéronautique, de spatial”

De la passion à revendre. Olivier Derroisne parle de son métier – inspecteur contrôleur sur infrastructures et systèmes spatiaux/ orbitaux – avec exaltation. Il faut dire qu’après un parcours scolaire compliqué, il n’aurait jamais pensé contribuer d’aussi près à la conquête spatiale. Au cours d’un échange passionnant, ce contrôleur présent chez Thales Alenia Space depuis 24 ans nous en dit plus sur sa mission, sa vocation et son envie profonde de transmettre. 

Bonjour Olivier ! Concrètement, que signifie votre titre de poste ?

Olivier Derroisne : Je suis dans la qualité. Cela veut dire que je m’occupe, je vérifie, je contrôle, j’atteste de tout ce qui a été construit sur les satellites et les systèmes satellitaires. Je gère les essais et les tests effectués sur le satellite avant le lancement. 

 

Cela comprend des tests environnementaux, physiques, techniques : on va soumettre le satellite à des sollicitations, des contraintes pour s’assurer qu’il supporte le décollage et les accélérations du lanceur.

 

Le satellite subit d’énormes vérifications, également sur sa « bonne santé », afin de savoir s’il répond aux attentes, aux besoins, et déterminer s’il se comporte correctement dans l’espace. Il y a différents jalons tout au long de sa fabrication, ainsi qu’une liasse documentaire très importante. 

“Nous sommes les derniers garde-fous avant de mettre le satellite sur la fusée”

Toutes ces procédures, sont-elles établies à l’avance ou les déterminez-vous aussi vous-même ?

O. D. : Bien souvent, les procédures d’inspection qualité sont déjà existantes et propres aux programmes, que ce soit pour un satellite télécom, d’observation, scientifique, météo, d’exploration extraterrestre ou militaire. Toutefois, on peut être amené à les modifier, à faire des avenants de façon à les adapter pour un nouveau programme. On apporte alors notre expérience et notre expertise, ainsi que notre savoir-faire sur les méthodes de contrôle pour créer de nouvelles procédures.

Pour résumer, nous sommes les derniers garde-fous avant de mettre le satellite sur la fusée et de l’envoyer dans l’espace.

 

 

Quelles sont les infrastructures – autres que des satellites – que vous contrôlez ?

O. D. : Ce sont des morceaux d’infrastructure ou de structure qui se posent sur une station spatiale, par exemple des petits équipements qui permettent l’observation et la vie de la station spatiale. Cela peut être un bras, des équipements de géométrie solaire, des paraboles, des panneaux solaires… Des équipements de mesure, de vérification, de multiples paramètres physiques.

 

Plusieurs pays participent à la construction puis l’assemblage et le contrôle d’un satellite.  Par exemple, en Italie on va faire la structure, en Espagne les panneaux solaires, en France le corps du satellite et la plateforme, qui n’est autre que le squelette du satellite. Chacun fait un morceau. 

 

Généralement, combien de temps prend l’inspection qualité d’un satellite ?

O. D. : Cela dépend des satellites : certains sont construits en six semaines, d’autres en plusieurs années. Par exemple, ce weekend, j’ai peut-être l’inspection d’un satellite scientifique MTG (Météosat troisième génération, ndlr), un satellite météo de troisième génération, qui devrait me prendre une journée. Ce sont de petits satellites, comme une constellation, qui sont dédiés à nous faire gagner en précision météo.


Pour un satellite télécom, cela peut prendre de 18 à 24 mois. Je vais effectuer des vérifications avec l’électricien, l’opérateur, le mécanicien… Le service opérationnel est estimé à 17 métiers. 

“Un satellite s’ouvre comme une chrysalide, un papillon”

Vous sauriez construire un satellite vous-même, du début à la fin ?

O. D. : Oui, absolument ! Au cours de ma licence, en 2023, à l’IUT de Nîmes et Montpellier, nous avons d’ailleurs construit un satellite, de la taille d’une boîte à chaussure. En fait, ce n’est pas bien compliqué, si on schématise : un satellite, c’est un émetteur-récepteur, c’est tout. Il va décupler un signal et le transmettre sur une zone donnée pour fournir du réseau téléphonique, de la télévision, ou internet.

 

 

Justement, vous parlez de votre licence. Quel a été votre parcours académique pour en arriver à votre poste actuel ?

O. D. : J’ai quitté le lycée avec un bac pro en productique mécanique. J’ai ensuite intégré une usine de mécanique de précision à Monaco pendant 11 ans. J’y ai exercé différents postes : galvanoplastie, tôlerie, montage, assemblage.


Deux ans avant de partir, j’avais monté de toute pièce un service de contrôle qualité afin d’obtenir la certification ISO9001. Mais j’avais d’autres ambitions : je suis entré chez Thales en 2001, en tant que contrôleur qualité. Je suis arrivé sur les petits mécanismes : articulations, moteurs, mécanismes de gerbage / dégerbage ainsi que la libération d’antennes, en passant par les systèmes de liaisons et autres infrastructures mécaniques tels que des pieds, jambes de force et/ ou tripodes de tenue statique.

 

Car le satellite, quand il est envoyé dans l’espace, il se déploie. Il s’ouvre comme une chrysalide, un papillon. Et il faut donc des articulations pour déployer les équipements. Pendant presque 15 ans, j’ai contrôlé tous ces petits mécanismes, puis j’ai passé mon BTS, et, juste après, ma licence. Et en ce moment-même, je passe mon bac + 5, que j’obtiendrai à la fin de l’année.

“Finir ingénieur, c’est une manière de conjurer le sort d’un parcours scolaire peu classique”

Félicitations ! Pourquoi avoir choisi de reprendre vos études en cours de carrière ?

 

O.D. : Merci. Je suis assez content. Assez fier. J’avais envie de reconnaissance personnelle. Finir ingénieur, c’est une revanche, une manière de conjurer le sort d’un parcours scolaire peu classique. 

 

Pour quelqu’un qui avait du mal avec l’école et cherchait du sens aux apprentissages, j’ai aujourd’hui un parcours atypique qui mérite d’être partagé. Avec la maturité, l’expérience, les années de pratique, je maîtrise mon sujet. 

 

Depuis 15 ans, je suis aussi devenu enseignant. Je fais découvrir la technique et le spatial à mes élèves. Le weekend, je suis chez Thales, et en semaine, je suis professeur de technologie contractuel dans plusieurs collèges. Sans prétention, je pense que je sais ce qui m’a plu dans le spatial, et que donc, je sais ce qui va leur plaire. Je travaille tout le temps, mais je fais quelque chose qui me plaît, qui me donne envie de me lever tous les matins. Ça fait 35 ans que je suis heureux de travailler.

“Ce que je n’ai pas eu à l’école, je le donne aujourd’hui” "

Vous êtes également un ambassadeur très actif sur My Job Glasses, avec déjà plus de 40 rendez-vous à votre actif. À quoi attribuez-vous cette envie de transmission ?

O.D. : J’ai de multiples casquettes pour essayer de réconcilier les enfants et les ingénieurs en devenir avec l’enseignement technique, avec l’industrie. Ce que je n’ai pas eu à l’école, je le donne aujourd’hui. Aujourd’hui, je réussis à montrer que je me suis réalisé dans le milieu professionnel.

 

Et c’est pour ça aussi que je suis sur une plateforme comme My Job Glasses. Si je peux allumer une étincelle, pour moi le pari est gagné. Ce que je leur apporte, c’est la passion. 


L’aéronautique, c’est un hasard ou vous saviez depuis toujours que c’était le secteur qui était fait pour vous ? 

O.D. : Depuis tout petit, je rêve d’aéronautique. Je suis la génération Goldorak, de l’émission Temps X présentée par les frères Bogdanoff, d’Albator. Ça a bercé toute mon enfance. Ça m’a toujours passionné. Je n’ai pas réussi à être pilote de chasse, mais j’ai tout de même réussi à intégrer l’environnement aérien. Et quand je pars en Guyane, en Floride, en Californie, c’est tout simplement l’apothéose. J’ai les yeux remplis de lumière.

Et maintenant ?

Le parcours d’Olivier vous intéresse ? Vous aimeriez découvrir la richesse des métiers de l’aéronautique ? Contactez l’un des 1000 ambassadeurs de cette filière sur My Job Glasses et obtenez toutes les réponses à vos questions !